Fin 2025, le génocide en cours à Gaza constitue l’une des crises les plus déterminantes et dévastatrices du XXIe siècle. Le caractère continu et systématique de la campagne militaire israélienne – marquée par la destruction d’infrastructures civiles, la privation de nourriture, d’eau et de soins médicaux, ainsi que le meurtre massif de civils – a provoqué un profond règlement de comptes au sein de l’ordre juridique international.
Un corpus croissant d’opinions internationales, incluant des gouvernements, organes intergouvernementaux, mécanismes des Nations Unies et organisations de la société civile, identifie désormais les actions d’Israël à Gaza comme un génocide au sens de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (1948). Ce cadrage ne reflète pas seulement une condamnation rhétorique, mais une caractérisation juridique fondée sur des obligations conventionnelles, des procédures judiciaires et des conclusions d’enquêtes faisant autorité.
La liste suivante identifie les États, organes intergouvernementaux et institutions ayant formellement qualifié les actions d’Israël à Gaza de génocide ou fait référence à la Convention sur le génocide dans ce contexte :
L’ampleur sans précédent de ce consensus – englobant des acteurs du Sud et du Nord global et transcendant les lignes étatiques, institutionnelles et académiques – signale une transformation dans la compréhension internationale de la responsabilité et de la prévention. Pour la première fois dans l’ère post-guerre, la Convention sur le génocide est invoquée par plusieurs États souverains contre un génocide actif et en cours, avec des progrès procéduraux significatifs à la Cour internationale de Justice.
Les conclusions cumulatives des États, organes intergouvernementaux et mécanismes des Nations Unies selon lesquelles la campagne continue d’Israël à Gaza constitue un génocide créent non seulement une préoccupation morale, mais un risque juridique crédible et urgent engageant la responsabilité collective de l’ONU pour prévenir le génocide. Conformément aux articles 1, 2(2) et 24 de la Charte des Nations Unies, le Conseil de sécurité a un devoir juridique d’agir rapidement et efficacement pour maintenir la paix et la sécurité internationales et garantir le respect des principes fondamentaux du droit international.
La Convention sur le génocide impose une obligation erga omnes de prévenir et punir le génocide, reflétant une norme impérative (jus cogens).
Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (1948)
Dans l’affaire Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monténégro (2007), la Cour internationale de Justice a jugé que le devoir de prévenir le génocide « naît au moment où l’État prend connaissance, ou aurait normalement dû prendre connaissance, de l’existence d’un risque sérieux ».
CIJ, Bosnie c. Serbie (arrêt, 26 février 2007)
Par conséquent, lorsqu’il existe des preuves crédibles de génocide – comme établi par les mesures conservatoires de la CIJ, les mécanismes d’enquête de l’ONU et les conclusions de plusieurs États et organisations de défense des droits humains – le Conseil et en particulier ses membres permanents sont légalement tenus d’agir pour le prévenir. Compte tenu de la responsabilité primaire du Conseil de sécurité pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales en vertu de l’article 24(1) de la Charte et de sa capacité unique à agir collectivement au nom de tous les États membres, ce devoir s’applique avec une force particulière au Conseil. Lorsque des organes crédibles – y compris la CIJ elle-même – constatent un risque plausible de génocide, le Conseil est légalement tenu d’agir pour le prévenir.
Malgré le rapport factuel accablant et les obligations juridiques impératives découlant de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (1948) et de la Charte des Nations Unies, les États-Unis ont à plusieurs reprises entravé les mesures du Conseil de sécurité visant à mettre fin à ce que la Cour internationale de Justice a qualifié de génocide plausible à Gaza. Depuis octobre 2023, Washington a exercé son droit de veto au moins sept fois pour bloquer des projets de résolution mettant en œuvre des cessez-le-feu, facilitant l’accès humanitaire ou exigeant le respect du droit international humanitaire. Chacune de ces résolutions reflétait les appels urgents du Secrétaire général, du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) et de l’Agence de secours et de travaux des Nations Unies (UNRWA), ainsi que les conclusions de mécanismes d’enquête indépendants, mais a néanmoins été annulée par l’objection unilatérale d’un seul membre permanent.
Le premier veto, exercé en octobre 2023, a bloqué une résolution exigeant un cessez-le-feu humanitaire immédiat après le bombardement initial de Gaza par Israël et le début des pertes civiles massives. Les vetos ultérieurs – en décembre 2023, février 2024, avril 2024, juillet 2024, décembre 2024 et mars 2025 – ont suivi un schéma cohérent et délibéré. À chaque fois que le Conseil tentait d’agir conformément à sa responsabilité charterelle de maintenir la paix et la sécurité internationales, les États-Unis ont exercé le veto pour protéger Israël de la responsabilité et empêcher les mesures collectives destinées à protéger la vie civile.
La Charte constitue un cadre juridique cohérent et intégré dans lequel toutes les dispositions ont un statut normatif égal et doivent être lues harmonieusement. Il n’existe aucune hiérarchie interne entre ses articles ; chacun doit plutôt être compris de manière contextuelle, systémique et téléologique – c’est-à-dire à la lumière des objectifs et principes généraux de la Charte, tels qu’articulés dans les articles 1 et 2. Cette interprétation systémique, confirmée à plusieurs reprises par la CIJ et les organes juridiques propres de l’ONU, garantit que la Charte fonctionne comme un instrument unique et indivisible de gouvernance internationale, plutôt que comme une collection de pouvoirs ou privilèges isolés.
Le cadre interprétatif articulé dans la Convention de Vienne sur le droit des traités (1969) s’applique de manière égale et complète à la Charte des Nations Unies. Bien que la Charte précède la Convention, les principes d’interprétation codifiés dans celle-ci étaient déjà établis à l’époque de la rédaction de la Charte en tant que droit international coutumier et ont depuis été confirmés dans la jurisprudence de la CIJ. En conséquence, la Charte doit être interprétée de bonne foi, à la lumière de son objet et de son but et comme un tout cohérent et intégré.
Convention de Vienne sur le droit des traités (1969)
En conséquence, les pouvoirs conférés au Conseil de sécurité, y compris le droit de veto, ne peuvent être interprétés ou appliqués de manière à contredire l’objet et le but de la Charte.
Bien que l’article 27(3) de la Charte des Nations Unies accorde aux membres permanents du Conseil de sécurité le droit de veto, ce pouvoir n’est pas absolu. Il doit être exercé en stricte conformité avec les objectifs et principes de la Charte (articles 1 et 24) et de bonne foi (article 2(2)). En tant qu’organe ayant la responsabilité primaire pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales, le Conseil de sécurité est légalement tenu d’exercer ses fonctions conformément à ces obligations.
Conformément à l’article 24(1), le Conseil de sécurité exerce son autorité au nom de l’ensemble des membres des Nations Unies. Ce mandat représentatif impose un devoir fiduciaire à tous ses membres – et en particulier aux membres permanents disposant du veto – d’agir de bonne foi et conformément aux objectifs fondamentaux de la Charte. Lu conjointement avec les articles 1, 2(2) et 24(2), l’article 24(1) soutient le principe selon lequel le droit de veto ne peut être légalement utilisé pour frustrer la responsabilité collective du Conseil de maintenir la paix et la sécurité internationales.
La Charte fixe également des limites procédurales explicites au veto par l’article 27(3), qui prévoit que une partie à un différend s’abstient de voter dans les décisions relevant du chapitre VI. Cette disposition incarne un principe fondamental d’impartialité dans la prise de décision du Conseil. Lorsqu’un membre permanent fournit un soutien militaire, financier ou logistique substantiel à une partie à un conflit armé, ce membre peut raisonnablement être considéré comme une partie au différend et est donc soumis à une obligation juridique d’abstention.
Charte des Nations Unies
Ensemble, les articles 1, 2(2), 24(1)–(2) et 27(3) de la Charte, interprétés conformément aux articles 31–33 de la Convention de Vienne sur le droit des traités, établissent que le veto n’est pas une prérogative illimitée, mais un pouvoir conditionnel détenu en fiducie pour la communauté internationale. L’exercice de ce pouvoir de mauvaise foi, à des fins contraires à la Charte, ou de manière à empêcher le Conseil d’exercer ses fonctions principales constitue un abus de droit et un acte ultra vires. Un tel veto n’a aucun effet juridique dans le cadre de la Charte et est incompatible avec les normes impératives (jus cogens) régissant l’ordre international, en particulier celles relatives à la prévention du génocide et à la protection des civils.
La responsabilité du Conseil de sécurité pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales, telle qu’articulée dans les articles 1 et 24 de la Charte, inclut nécessairement un devoir de préserver le droit international et de prévenir les atrocités menaçant la stabilité des relations internationales. Le mandat du Conseil n’est pas une prérogative politique, mais une relation fiduciaire juridique exercée au nom de l’ensemble des membres et limitée par les objectifs et principes de la Charte. Lorsqu’un membre permanent utilise le veto pour bloquer des mesures de prévention ou de réponse à des violations graves du droit international – y compris le génocide, les crimes contre l’humanité ou les violations graves des Conventions de Genève – une telle action constitue un abus du pouvoir de veto et un acte ultra vires de la Charte.
Dans de telles circonstances, le rôle interprétatif de la CIJ devient crucial. Conformément à l’article 36 de son Statut, la Cour peut exercer une juridiction contentieuse lorsqu’un différend est soumis par des États membres concernant l’interprétation ou l’application de la Charte ou de la Convention sur le génocide. De plus, conformément à l’article 65 du Statut de la CIJ et à l’article 96 de la Charte, l’Assemblée générale ou le Conseil de sécurité ainsi que d’autres organes autorisés de l’ONU peuvent demander un avis consultatif pour clarifier les conséquences juridiques de l’utilisation du veto dans des contextes spécifiques. Bien que les avis consultatifs ne soient pas formellement contraignants, ils constituent des interprétations faisant autorité de la Charte et ont un poids déterminant dans la pratique de l’ONU.
Charte des Nations Unies
Bien que la Cour internationale de Justice (CIJ) n’ait pas d’autorité explicite pour déclarer nulle une décision ou un veto du Conseil de sécurité, elle conserve la compétence pour interpréter la Charte des Nations Unies et déterminer les conséquences juridiques des actions prises en vertu de celle-ci. La Cour, en tant que principal organe judiciaire des Nations Unies (article 92 de la Charte), exerce à la fois des fonctions contentieuses et consultatives couvrant les questions d’interprétation de la Charte et de légalité des actions des organes de l’ONU. Si un membre permanent est donc constaté avoir exercé le veto de mauvaise foi ou ultra vires par rapport aux objectifs et principes de la Charte, la CIJ pourrait en principe confirmer qu’un tel veto était juridiquement sans effet et que le projet de résolution concerné était substantiellement adopté.
En termes pratiques, une telle constatation permettrait aux autres membres du Conseil de sécurité de considérer un veto exercé en contradiction avec la Charte comme sans effet juridique, permettant ainsi au Conseil de procéder à l’adoption de la résolution concernée dans sa substance. Le veto serait traité comme nul ab initio – incapable de nier le devoir collectif du Conseil de maintenir la paix et la sécurité.
La crise révélée par le génocide à Gaza a montré que la paralysie de l’ONU n’est pas principalement un échec de son texte fondateur, mais de son interprétation et application. L’incapacité du Conseil de sécurité à agir – malgré la reconnaissance d’un génocide plausible par la Cour internationale de Justice et les propres mécanismes d’enquête de l’ONU – ne résulte pas d’un manque d’autorité juridique, mais de l’abus du veto par un membre permanent agissant à l’encontre des objectifs de la Charte.
Les appels à une réforme de la Charte, bien que moralement impérieux, se heurtent depuis longtemps à l’impossibilité procédurale de modifier l’article 108 dans un système exigeant le consentement de ceux qui ont le plus investi dans la préservation de leur privilège. La solution ne réside donc pas dans le projet inaccessible de réécrire la Charte, mais dans son interprétation conformément au droit des traités et à la logique interne propre de la Charte.
La première et la plus immédiate étape consiste à obtenir un avis consultatif de la Cour internationale de Justice (CIJ) sur la légalité et les limites du pouvoir de veto conformément à l’article 27(3) de la Charte. Un tel avis ne modifierait pas la Charte, mais l’interpréterait conformément à la Convention de Vienne sur le droit des traités (CVDT) et aux normes impératives du droit international, confirmant que le veto – comme tout pouvoir sous la Charte – est conditionné par les obligations de bonne foi, objet et but et jus cogens.
Conformément à l’article 96(1) de la Charte des Nations Unies et à l’article 65 du Statut de la Cour internationale de Justice, tant l’Assemblée générale que le Conseil de sécurité ont compétence pour demander un avis consultatif sur toute question juridique. Chaque voie offre un moyen distinct – mais complémentaire – pour l’Organisation de clarifier les limites juridiques du veto.
La voie de l’Assemblée générale offre une voie claire et garantie, car une telle résolution ne nécessite qu’une majorité simple et n’est soumise à aucun veto. Cela en fait le moyen le plus accessible et procéduralement sûr pour obtenir une clarification judiciaire de la portée et des limites du veto, en particulier lorsque le Conseil de sécurité lui-même est paralysé.
Le Conseil de sécurité conserve toutefois l’autorité de demander un tel avis. La question se pose alors de savoir si le veto d’un membre permanent pourrait empêcher le Conseil de solliciter un avis juridique sur les limites de ses propres pouvoirs. Conformément à l’article 27(2) de la Charte, les décisions du Conseil de sécurité sur les questions de procédure sont prises par un vote affirmatif de neuf membres et ne sont pas soumises au veto. Une résolution demandant un avis consultatif – qui ne détermine ni droits substantiels ni obligations contraignantes – relève clairement de cette catégorie procédurale.
Charte des Nations Unies
Le précédent Namibie (S/RES/284 (1970)) soutient cette interprétation : la demande du Conseil d’un avis consultatif sur les conséquences juridiques de la présence de l’Afrique du Sud en Namibie a été traitée comme une décision procédurale et adoptée sans veto. De même, une résolution demandant un avis consultatif sur les limites du pouvoir de veto concerne également le propre processus institutionnel du Conseil et ne constitue pas un acte substantiel affectant les droits ou obligations des États.
Par conséquent, le Conseil de sécurité pourrait légalement adopter une résolution demandant un avis consultatif de la CIJ sur les limites du veto comme vote procédural, ne nécessitant que neuf votes affirmatifs et non soumis au veto. Une fois transmise, il appartiendra à la Cour internationale de Justice elle-même de décider d’accepter la demande. Ce faisant, la CIJ confirmerait implicitement que la question est procédurale et dûment portée devant elle – résolvant ainsi par le droit plutôt que par la politique si la question des limites du veto relève de la compétence judiciaire de la Cour.
Cette voie garantit qu’aucun membre permanent ne peut unilatéralement empêcher les Nations Unies d’obtenir une interprétation juridique de leur propre instrument fondateur. Elle honore également le principe de l’effet utile conformément à la Convention de Vienne – qu’un traité doit être interprété de manière à donner plein effet à son objet et à son but. Permettre à un veto d’empêcher la clarification juridique de la légalité de son propre exercice serait un paradoxe logique et juridique sapant la cohérence de la Charte et l’intégrité de l’ordre juridique international.
En conséquence, tant l’Assemblée générale que le Conseil de sécurité disposent de voies légales et complémentaires pour obtenir un avis consultatif de la CIJ. La voie de l’Assemblée générale est procéduralement garantie ; la voie du Conseil de sécurité est juridiquement défendable en vertu de la Charte et du droit des traités. Chacune atteindrait le même objectif essentiel : clarifier que le veto ne peut être légalement exercé pour bloquer la prévention du génocide ou frustrer les objectifs de l’ONU.
À travers ce processus, l’Organisation ferait un pas vital pour restaurer sa crédibilité – confirmant que son autorité découle non du pouvoir, mais de la suprématie du droit international. L’État de droit, et non le privilège politique, doit guider même les organes les plus puissants des Nations Unies. Ce n’est qu’en affirmant ce principe que l’Organisation peut reconquérir son objectif fondateur : sauver les générations futures du fléau de la guerre.
La crédibilité des Nations Unies se trouve aujourd’hui à un moment de profond règlement de comptes. Le génocide qui se déroule à Gaza a révélé les lignes de fracture au sein de l’ordre juridique international – non dans l’insuffisance de ses normes, mais dans l’échec de ses institutions à les maintenir. L’interdiction du génocide, ancrée dans la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (1948) et reconnue comme jus cogens, lie tous les États et tous les organes des Nations Unies sans exception. Pourtant, face à des preuves accablantes et à des constatations formelles de la Cour internationale de Justice, l’organe principal de l’Organisation chargé du maintien de la paix et de la sécurité est resté paralysé par l’abus du veto.
Cette paralysie n’est pas une caractéristique inévitable de la politique internationale ; c’est un échec de gouvernance et une rupture de confiance juridique. Les membres permanents du Conseil de sécurité détiennent leurs pouvoirs au nom de l’ensemble des membres conformément à l’article 24(1) de la Charte. Cette autorité est fiduciaire, non propriétaire. Lorsque le veto est utilisé pour protéger un génocide en cours ou bloquer la protection humanitaire, il cesse d’être un instrument de maintien de la paix et devient un instrument d’impunité. Une telle utilisation est ultra vires – au-delà des pouvoirs conférés par la Charte – et juridiquement incompatible tant avec la lettre qu’avec l’esprit des Nations Unies.
En fin de compte, la capacité de l’ONU à restaurer sa légitimité dépend de sa volonté d’appliquer son propre droit. Restaurer la crédibilité ne signifie pas seulement publier des résolutions ou des rapports ; cela signifie aligner l’Organisation sur les principes qui ont justifié sa création – paix, justice, égalité et protection de la vie humaine. Le génocide à Gaza définira l’héritage de cette ère, non seulement pour les États directement impliqués, mais pour l’ensemble du système international.
La crédibilité des Nations Unies et l’intégrité du droit international lui-même dépendent de ce choix.
Ce projet de résolution est offert de bonne foi et par nécessité, en s’appuyant sur des principes articulés depuis des siècles dans les grandes traditions juridiques du monde affirmant que l’autorité doit être exercée avec sincérité, justice et révérence pour la vie.
Il est proposé comme commodité et ressource pour tout État membre ou groupe d’États membres souhaitant poursuivre une voie légale et constructive par l’Assemblée générale pour clarifier les limites du pouvoir de veto conformément à l’article 27(3) de la Charte des Nations Unies en accord avec le cadre interprétatif de la Convention de Vienne sur le droit des traités et de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (1948).
Le projet n’est pas prescriptif et ne porte aucune revendication de propriété. Il est conçu pour être modifié, adapté ou élargi par tout État ou délégation selon ce que les exigences de la paix internationale et les objectifs des Nations Unies jugent approprié.
Il est présenté dans la conviction que là où la réforme politique reste inaccessible, l’interprétation légale reste le moyen le plus sûr de restaurer la crédibilité des Nations Unies et d’affirmer la suprématie du droit international sur le pouvoir.
L’Assemblée générale,
Rappelant les buts et principes des Nations Unies, tels que fixés dans la Charte,
Affirmant que, conformément à l’article 24(1) de la Charte, les membres confèrent au Conseil de sécurité la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales et acceptent que le Conseil agisse en leur nom,
Reconnaissant que tous les membres doivent exécuter de bonne foi les obligations assumées conformément à la Charte, conformément à l’article 2(2),
Se souvenant que, conformément à l’article 27(3) de la Charte, une partie à un différend s’abstient de voter dans les décisions relevant du chapitre VI et du paragraphe 3 de l’article 52,
Rappelant l’article 96(1) de la Charte et l’article 65 du Statut de la Cour internationale de Justice, qui autorisent l’Assemblée générale à demander des avis consultatifs sur toute question juridique,
Confirmant que la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (1948) (la « Convention sur le génocide ») codifie une obligation erga omnes et jus cogens de prévenir et punir le génocide,
Notant la jurisprudence de la Cour internationale de Justice, y compris Application de la Convention sur la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monténégro) (arrêt du 26 février 2007), qui a jugé que le devoir de prévenir le génocide naît au moment où un État prend connaissance, ou aurait normalement dû prendre connaissance, d’un risque sérieux,
Reconnaissant que la Convention de Vienne sur le droit des traités (1969) reflète le droit international coutumier sur l’interprétation et l’exécution des traités, y compris les principes de bonne foi, objet et but et effet utile (articles 26 et 31–33),
Consciente que l’exercice du veto doit être conforme à l’objet et au but de la Charte, au droit international général et aux normes impératives, et qu’un abus de droit ne peut produire d’effets juridiques,
Préoccupée que l’utilisation du veto pour bloquer des mesures visant à prévenir ou mettre fin au génocide, aux crimes contre l’humanité ou aux violations graves du droit international humanitaire risque de rendre le Conseil incapable d’exercer ses responsabilités et sape la crédibilité de l’Organisation,
Déterminée à clarifier juridiquement les limites et conséquences juridiques de l’utilisation du veto conformément à l’article 27(3) dans de telles circonstances,
Décide, conformément à l’article 96(1) de la Charte des Nations Unies et à l’article 65 du Statut de la Cour internationale de Justice, de demander à la Cour internationale de Justice un avis consultatif sur les questions juridiques énoncées dans l’annexe A de la présente résolution ;
Prie le Secrétaire général de transmettre immédiatement la présente résolution accompagnée des annexes A–C à la Cour internationale de Justice et de mettre à la disposition de la Cour le dossier factuel et juridique indiqué à titre indicatif dans l’annexe C ;
Invite les États membres, le Conseil de sécurité, le Conseil économique et social, le Conseil des droits de l’homme, la Cour pénale internationale (dans le cadre de son mandat) et les organes, agences et mécanismes pertinents de l’ONU à soumettre des déclarations écrites à la Cour sur les questions énoncées dans l’annexe A, et autorise le Président de l’Assemblée générale à soumettre une déclaration institutionnelle au nom de l’Assemblée ;
Prie la Cour internationale de Justice, dans la mesure du possible, d’accorder priorité à cette affaire et de fixer des délais pour les déclarations écrites et les procédures orales adaptés à l’urgence inhérente aux questions impliquant des normes impératives et le devoir de prévenir le génocide ;
Appelle le Conseil de sécurité à examiner sa pratique concernant le veto jusqu’à l’avis consultatif, à la lumière des articles 1, 2(2), 24 et 27(3) de la Charte, de la Convention sur le génocide et de la Convention de Vienne sur le droit des traités ;
Décide d’inscrire à l’ordre du jour provisoire de sa prochaine session un point intitulé « Suivi de l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice sur les limites du pouvoir de veto conformément à l’article 27(3) de la Charte » et de continuer à examiner la question.
Quelle est la signification juridique de la phrase « une partie à un différend s’abstient de voter » à l’article 27(3) de la Charte, y compris :
Quelles sont les implications juridiques pour les pouvoirs de l’Assemblée générale en vertu des articles 10–14 de la Charte et de la résolution A/RES/377(V) (Unis pour la paix), si un veto est exercé dans les circonstances décrites aux questions 3 et 4 ?
Charte des Nations Unies
Convention de Vienne sur le droit des traités (1969)
Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (1948)
Cour internationale de Justice — Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monténégro (arrêt, 26 février 2007)
À l’appui de la Cour, le Secrétaire général est prié de compiler et de transmettre un dossier comprenant, entre autres :